Car à l’ACD, les mardis et jeudis soirs en période hivernale, lorsque le plafond (9000ft minimum) le permet et qu’un terrain de déroutement sûr a pu être fixé, nous sommes une trentaine de pilotes à nous élancer dans un ciel souvent étoilé pour goûter un plaisir un peu égoïste (mais souvent partagé) et surtout unique ! Rien n'est comparable au vol de nuit, source d'un bonheur intense et particulier, où tout est silence, douceur et sérénité. Mais avant de nous envoler, des tâches préparatoires sont indispensables. Il faut d’abord préparer la piste 04 dure (obligatoire pour le vol de nuit, sauf atterrissage d’urgence) dès qu'elle se libère pour notre joyeuse activité nocturne : on sort la camionnette de l’atelier, on prend la platine électronique d’allumage des feux de piste, et lentement (deux personnes sont nécessaires à cette tâche) on procède à leur mise en route (feux blancs répartis des deux côtés le long de la piste, rouges et verts aux seuils 04 et 22 et bleus pour les taxiways Écho 2 et Écho 3). Cet exercice est très amusant, quelle joie de rouler seuls sur la piste enfin libre et de procéder à la mise en place de notre terrain de jeu ! Nos avions attendent sagement sur le parking, pleins carburant anticipés et faits. Ça fait rêver ! Nous profitons de la pause légale de 30 minutes imposée au contrôle pour nous équiper (bonnet, gants, gilet jaune ou orange et surtout… lampe frontale et téléphone portable, outils indispensables pour effectuer une pré-vol en bonne et due forme !) et contrôler tranquillement nos machines. Le club house se transforme lentement, l’éclairage disparaît en partie pour habituer nos yeux à l'obscurité. Aucun doute, l’ACD vol de nuit n’a plus rien à voir avec l’ACD vol de jour ! Nous échangeons sereinement entre pilotes, comme si le temps était, quelque part, suspendu… Nos avions prêts, nous procédons au démarrage moteur en ayant au préalable prévenu nos petits camarades avec deux appels de phare, rien n’est laissé au hasard en termes de sécurité. Chauffe moteur. Cela prend parfois un peu de temps, puis, après autorisation du contrôle, nous roulons doucement, tous phares allumés, sur la ligne jaune jusqu’en Écho 1. Essais moteur phares éteints, pour ne pas gêner les avions qui atterrissent.
Alignement. L’adrénaline monte, le plaisir aussi… Décollage sur l’axe. Nous voilà dans un ciel que la lune éclaire souvent partiellement, voire totalement, respect indispensable des paramètres, la vent arrière nous laisse le temps d’admirer les lumières de Grenoble, le flux stressé des autos que nous dominons avec une certaine fierté ! Repérage de la piste 04 (notre balisage ne ressemble pas tout à fait à celui de Saint-Geoirs !), base, concentration sur le PAPI, notre bouée de sauvetage du soir, qui nous aide bien avant de retrouver en toute fin de courte finale (grâce à nos phares) le peigne et l’axe de la 04 ! Certes, nous avons tout de même appris lors de notre qualif VDN à nous poser sans phares ni PAPI et croyez-nous, ça marche aussi ! Le tour de piste c’est bien, mais un local Nord, ou un vol vers Saint-Geoirs, ou enfin une longue nav, constituent des escapades inoubliables, où notre vie du jour s’efface pour laisser place à une belle parenthèse de nuit. Les vols se suivent sans pause car le temps file : nous sommes contraints à une fin de période de jeu à 21.00 (22.00 pour les longues navs). Le ballet des avions en tour de piste est beau à voir, on ne s’en lasse pas ! Fin de partie, la camionnette du club roule à nouveau pour éteindre une par une les balises, puis rentre se garer à l’atelier. Il fait nuit à nouveau sur notre terrain de jeu… Vivement mardi ou jeudi prochain ! Sophie Bonneville